• La pédagogie de projet

     

     Pourquoi la pédagogie de projet ?

    Chaque année, les mêmes rituels nous attendent pour préparer au mieux la rentrée et permettre à nos élèves d’acquérir les compétences nécessaires pour passer sereinement dans la classe supérieure. Le projet de classe en fait partie et je ne me vois pas commencer une année sans en avoir commencé la rédaction avec soin. Je pars toujours d’un état des lieux de mon groupe classe et en fonction de celui-ci, j’en définis des objectifs précis qui seront à atteindre d’ici la fin de l’année. Mon projet une fois entièrement rédigé, devient ainsi un fil conducteur pédagogique où viennent s’articuler des actions prédéfinies afin d’atteindre les compétences devant être travaillées par mes élèves.

    Au fil de mes rentrées, j’ai pris de plus en plus de soin dans la rédaction de mes projets de classe voyant des résultats plus que positifs sur la progression de mes élèves et ceci quel que soit leur niveau. Mes projets étant d’année en année plus ambitieux et touchant toutes les disciplines abordées de par leur pluridisciplinarité, c’est tout naturellement, que je me suis intéressée à la pédagogie de projet dans laquelle s’inscrivait de plus en plus ma manière d’enseigner.

    Qu’est-ce que la pédagogie de projet ?

    Cela consiste à partir d’un véritable projet, de faire progresser les élèves dans toutes les disciplines et ceci sans qu’ils en aient véritablement conscience. En effet, le projet choisi en fonction de la motivation des élèves, doit être abouti dans un temps déterminé par l’enseignant et les différents partenaires qui y sont associés.

    La réalisation concrète d’un projet donne du sens  à l’ensemble de tâches devant être faites par les enfants. Cela permet ainsi de développer des savoirs, des savoirs-faire et des savoirs-être tout au long  des différentes étapes nécessaires. Chaque élève, en fonction de ses propres compétences et intérêts, peut ainsi apporter au groupe classe ou recevoir de celui-ci, conseils et aide. Cela le fait ainsi progresser à tous les niveaux notamment au niveau des compétences à acquérir tout au long de l’année et ceci en transdisciplinarité.

    Les différents échanges indispensables à l’élaboration du projet, permettent également de favoriser la socialisation des élèves. Ils sont à la fois le lien et le vecteur entre les différents partenaires. Un projet concret, nécessite en effet, de faire intervenir des professionnels qui seront à la fois conseillers et participants si besoin. Toutes les tâches ne sont pas toujours réalisables par les enfants et il faut donc en tenir compte au moment de l’élaboration du projet avec les élèves.

    Dans ce type de pédagogie, la motivation des élèves est très importante et l’enseignant doit souvent « remotiver ses troupes » et veiller au bon déroulement de chaque étape en fonction du calendrier qu’il faut suivre scrupuleusement au risque de bousculer parfois le déroulement prévu d’une journée de classe. L’enseignant est, et doit toujours rester, le coordinateur du projet auprès des élèves et des éventuels partenaires.

    Quelques rappels historiques de différentes méthodes de pédagogies de projet

    John Dewey (1859- 1952), philosophe et psychologue américain

     Il est l'initiateur des méthodes actives et notamment de la méthode des projets. Sa doctrine est le fameux« learning by doing » : apprendre en faisant et non en écoutant des leçons imposées. L'enfant doit agir, construire des projets, les mener à terme, faire des expériences et apprendre à interpréter.

    Ovide Decroly (1871-1973), médecin psychologue et pédagogue belge

     La méthode fait elle aussi appel aux expériences des élèves et à leurs initiatives, ce qui      requiert des projets. Le plan du livre de vie (qui remplace les manuels) est discuté et fixé par les élèves et le maître en collaboration continue.

    Roger Cousinet (1881- 1973), pédagogue français

     Il met en place une méthode de travail libre par groupes qui suscite des projets. Les élèves y ont toute liberté de créer et d'entreprendre à partir des questions qu'ils se posent. Le pédagogue est un collaborateur. 

    Célestin Freinet (1896-1966), pédagogue français

    Dans sa pédagogie, rendre les élèves actifs est primordial. Il développe un système basé sur trois dimensions :

    - la classe est organisée en coopérative

    - les connaissances s'élaborent dans des projets d'action ou de recherche

    - l'école produit et diffuse ses propres instruments de travail

     

    Jean Piaget (1896-1980) va contribuer à renforcer la base théorique de la pédagogie de projet.

     

    La pédagogie cognitive a également influencé la pédagogie de projet.

     

    Pour finir, Marc BRU et Louis NOT définissent en cinq fonctions cette pédagogie :

    Ø  une fonction thérapeutique : les élèves s'engagent dans des activités dont ils perçoivent le sens ce qui renouvelle leur intérêt pour l'école,

    Ø  une fonction didactique : les actions nécessaires à la réalisation du projet sont des moyens de mobiliser des savoirs acquis et de développer des connaissances nouvelles, 

    Ø  une fonction économique et de production : l'action à réaliser doit tenir compte des contraintes économiques, matérielles, temporelles et humaines,

    Ø  une fonction sociale : le projet permet de s'ouvrir aux autres, à d'autres institutions; à partager des compétences, à confronter des avis,

    Ø  une fonction politique : la participation active au projet implique une vie collective et donc une formation à la vie civique.

     

    Qu’implique une pédagogie de projet ?

    Il faut avoir en tête que ce type de pédagogie implique un investissement colossal et cela peut faire peur au début. Mais au fil des années, avec l’expérience, l’organisation même des projets devient plus facile.  C’est un moyen d’apprendre qui va motiver les élèves  en s’appuyant sur des actions bien précises et définies au préalable avec ou sans les enfants. La production qui est attendue à la fin en est le but ultime pour l’élève alors que pour nous, enseignants, ce n’est que le moyen d’atteindre nos objectifs. 

    Pour s’assurer une réussite, il faut donc impliquer au maximum les enfants en leur donnant au fur et à mesure et avec précision, les objectifs à atteindre pour réaliser le projet choisi. Il faut également en tant qu’enseignant, accepter de se mettre en avant vis-à-vis des différents partenaires dont les parents. Au début, cela peut paraître difficile d’expliquer aux familles les différentes phases du projet et de les y impliquer. Il faut accepter d’échanger avec eux et de les associer en tant que véritables partenaires. J’ai toujours été surprise de voir l’énergie que certains parents déployaient pour aider. L’idée d’échanger des compétences et d’apporter aux autres peut soulever des montagnes. Aujourd’hui encore, je reste surprise devant les productions finales de qualité quasi professionnelle obtenues, et ceci grâce aux familles d’élèves.

    Si  pour nous cela n’est pas toujours simple, il faut garder à l’esprit, que pour certains parents d’élèves cela n’est pas toujours facile de s’impliquer à l’école pour plusieurs raisons dont la peur même de l’institution. Il faudra gentiment les inclure au projet, et ne surtout pas brusquer les choses. On peut parfois, avoir également très peu d’investissement de la part des parents d’une classe et c’est seulement avec un ou deux, au grand maximum, que le projet se met en place.  Peu importe, car il vaut mieux des partenaires peu nombreux mais efficaces que beaucoup de partenaires brassant de l’air. Quoi qu’il en soit, il est important de rester le maître du jeu et cela signifie de toujours rester vigilant aux dires des partenaires et de garder le dernier mot sur ce qui doit être fait par, avec ou sans les enfants.

    Le respect du calendrier est aussi très important pour la bonne réalisation des productions attendues d’autant que pour certaines, il est nécessaire de passer par des prestataires extérieurs qui ont eux aussi des impératifs de dates. C’est pourquoi, la pédagogie de projet se déroule toujours sur un modèle d’organisation quasi identique d’une année à l’autre. Ainsi, au cours du mois de septembre, observation du groupe classe et détermination de ses besoins. Réflexion autour de la mise en place d’un projet : faire quoi ? Pour qui ? Pourquoi ? Comment ?... En octobre, proposition au groupe classe d’un pré-projet.  Après sa validation avec ou sans modifications des élèves, mise en place, à partir des programmes, des objectifs fixés et des compétences nécessaires à sa réalisation. Il est alors nécessaire d’établir un cahier des charges précis avec l’élaboration d’un plan de financement. Un projet concret ne peut se faire sans frais. Heureusement pour nous, différentes solutions s’offrent à nous pour nous y aider comme le concours Récréa’Caf, l’OCCE, la municipalité. Jusqu’en décembre, des activités préalablement définies sont faites afin de répertorier toutes les idées des enfants. Celles-ci seront analysées avec soin avec les élèves et ne seront gardées que les meilleures. Une réunion avec les parents sera également organisée. Y seront exposés le projet et les idées des enfants pour le réaliser. Une liste détaillée avec tous les partenaires sera également établie où figureront les impératifs de chacun pour aider au bon déroulement de chaque étape de la réalisation du projet. De janvier à fin mars, début avril au plus tard, toutes les activités faites par les élèves, seront réalisées en classe ou sur un temps extrascolaire si besoin. Il est évident, que le délai est extrêmement court compte-tenu des vacances scolaires mais il est nécessaire de s’y tenir afin de se laisser les derniers mois pour transférer certaines étapes du projet aux professionnels (impression d’un livre, montages vidéo…). C’est en juin, qu’il sera temps de montrer le projet terminé, d’exposer les travaux des élèves (que l’on aura soigneusement gardés au fur et à mesure) soit au moment de la fête de l’école ou lors d’un temps prévu au préalable avec les familles.  Il sera important d’inviter tous les partenaires extérieurs à l’école lors de ce temps de rencontre et d’échanges entre tous les acteurs du projet.

     

    En résumé, la réussite d’une pédagogie de projet implique un engagement personnel de tous les acteurs même s’il n’a pas la même ampleur pour tous. Ce n’est pas le projet de l’enseignant mais celui des enfants. Ceux-ci participent à sa conception, sa gestion, sa réalisation et son évaluation.  C’est donc un pré-projet qui est proposé aux élèves en début d’année. Il doit correspondre aux besoins des enfants, s’inscrire dans l’originalité d’une vraie réalisation. Il faut que les enfants soient partie prenante. Beaucoup de tâtonnements seront nécessaires au début pour la mise en place des différentes étapes de réalisation. Des activités de résolution de problèmes seront mises en place notamment pour la gestion des comptes, indispensables pour que l’implication des enfants soit totale. Les enfants doivent avoir un réel pouvoir de décision afin de ne pas se faire déposséder de leur projet qui est, et doit rester le leur. L’enseignant sera le garant du bon déroulement en imposant un cadre stricte et rassurant pour ses élèves. Il sera prêt à communiquer régulièrement avec les partenaires extérieurs et ceci autant que nécessaire.

     

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  • Commentaires

    1
    marine2
    Dimanche 10 Novembre 2013 à 19:11

    Well done Muriel ! Ton enthousiasme est évident : un big merci à toi de partager ton expérience , ça donne envie, tu sèmes des graines d'idées dans nos têtes ...

    2
    Jeudi 28 Avril 2016 à 21:22

    Bel article. Dis moi, qu’est-ce que le concours récréa'Caf dont tu parles?

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    3
    Vendredi 29 Avril 2016 à 13:56

    Merci pour ton commentaire. Le concours récréa 'Caf permet d'obtenir des fonds (jusqu'à 2000€) pour financer son projet. Celui-ci se passe dans le département des Hauts-de-Seine chaque année. Il faut remplir une fiche descriptive et fournir des devis pour justifier les besoins. Ensuite, un mercredi après-midi, il faut aller avec ses élèves (ou une partie), quelques parents, expliquer son projet devant un jury. Celui-ci détermine la validité de la demande et détermine l'enveloppe budgétaire que l'on recevra si on est retenu. C'est un concours sur l'ensemble du département ouvert à toutes les écoles donc on doit vraiment être original et pertinent. Il repose sur le partenariat avec les familles et les acteurs du projet dont l'enseignant est le principal référent . Je ne sais pas par contre, si ce concours existe dans d'autres départements. Il faut se rapprocher de sa CAF (aller sur leur site) pour voir si c'est le cas. D'autres infos complémentaire sur cette page de la caf: http://lalettrecaf92.blogspot.fr/p/jeunesse.html

     

    4
    Vendredi 29 Avril 2016 à 16:14

    Merci !

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